Premières Journées d’Études

L’interculturalité au service des Transitions

Affiche Journées d'études 2021

La Chaire Interculturalités de l’Université de Haute-Alsace (UHA) organise ses premières journées d’études les 9 et 10 décembre 2021 dans la salle du Conseil de l’École Nationale Supérieure de Chimie de Mulhouse (ENSCMu).

Placées sous la thématique de « L’interculturalité au service des Transitions », ces journées s’ouvriront le 9 décembre par une fresque du climat et se poursuivront avec les interventions d’une dizaine d’invités.

Ces interventions, qui rythmeront l’événement, seront l’occasion pour les invités de présenter leurs thématiques de recherche avant d’échanger et de discuter avec les participants, confrères et consœurs, des opportunités et des défis de la transition dans une approche interculturelle.

La notion de transition occupe depuis quelques années une place croissante dans la réflexion et l’action de nos sociétés actuelles. Elle est ici entendue au sens large, incluant ainsi un important panel de transitions : climatique, énergétique, biologique, sociale, économique, etc.

L’approche interculturelle de ces journées d’études interdisciplinaires, offre un angle original à l’étude d’une thématique pourtant déjà abordée dans de nombreux domaines et contextes. L’objectif est ici de créer un lien entre les présentations proposées par des chercheurs venant d’horizons divers qui s’inscriront dans l’une des quatre problématiques suivantes :

  • perspectives sur la transition écologique et énergétique ;
  • transition sociale ;
  • transition numérique ;
  • transition démocratique et solidaire.

Les journées d’études organisées par la Chaire Interculturalités s’appuieront sur la dynamique interculturelle afin de contribuer aux transitions nécessaires pour répondre aux défis sociétaux contemporains. De par les champs de compétences variés des participants, ces deux jours constitueront première étape de dialogue interdisciplinaire et transversal, dont pourront émerger des problématiques, des pistes de recherche et projets communs.

Programme

Retrouvez l’intégralité du programme de ces deux journées ci-dessous.

Programme du 9 décembre 2021

Les savoirs géoscientifiques contemporains sur le système Terre viennent compromettre la pérennité de l’aventure humaine en société. Partant de ce constat nous envisageons différents types de transition. Mais s’agit-il d’un concept opératoire suffisamment radical compte tenu de la gravité des savoirs de l’Anthropocène et de la mutation en cours de la planète ? Ne devons-nous pas alors envisager une réelle mutation humaine, qui prenne acte des limites de la Terre – et qui procède, non d’une amélioration ou d’une augmentation de l’individu, mais d’un changement radical (du latin radix, signifiant racine) de la façon dont nous coexistons, entre humains, et entre humains et non-humains. Le travail d’analyse de l’Anthropocène permettant d’identifier une origine causale dans cette soif qui nous pousse à la possession illimitée et à la domination (l’hybris, moteur de la vie économique), la mutation appelée, oppositionnelle, porte sur cet espace qui est « entre » et est autant anthropologique que politique. Cette contribution est une tentative de recherche des nouveaux concepts de l’action politique pouvant venir aiguiller une action éducative critique, résistante et utopique.

« La conscience des étudiants » est un fil conducteur pour la mise en œuvre d’outils et d’animations pédagogiques. Afin de sensibiliser les esprits des étudiants à la grande thématique de l’Énergie, elle est abordée par des prismes différents tels que la chimie (ressources énergétiques fossiles, …) ou encore l’économie (conséquences sur les marchés, PIB, …).

Après deux années de construction, un premier matériau pédagogique – coanimé par une chimiste (S. Alavi) et un économiste (G. Kotnarovsky) – s’articule autour de plusieurs ateliers d’acquisitions de connaissances et de compétences transverses. L’ensemble de ces ateliers seront présentés et plus particulièrement OGRE, Ordre de GRandeurs des Energies, serious game ludique développé sur la base des données des rapports du GIEC et des analyses de D. J. C. MacKay.

  • 16h00 : Atelier de synthèse
  • 19h30 : Repas en ville
Programme du 10 décembre 2021

La perspective d’un effondrement lié à l’Anthropocène se précise : il sera environnemental puis sociétal (il deviendra difficile de vivre dans des sociétés organisées et nombreuses comme celles que nous connaissons). L’ambition qui est la nôtre dans cette réflexion, c’est de remonter aux sources de l’effondrement, pour y remédier. Nous verrons ainsi que c’est dès le début de l’instauration du système capitaliste, au 15ème siècle, qu’une expropriation de certains peuples se produit, ainsi qu’une exploitation massive de ressources naturelles. Cette tendance va s’accélérer et s’aggraver à chaque nouvelle étape historique du développement capitaliste : industrialisation, consumérisme et consommation et enfin virtualisation. L’intensification de ce système accentue toujours plus l’aliénation humaine, la tendance à rendre l’humain étranger à lui-même, notamment en le coupant de ses ressources propres et de ses liens vernaculaires.

Une fois posé ce diagnostic, il s’agira de penser une reconstruction, qui consistera à retrouver des forces propres, en soi, avec l’autre, dans le monde, sans nécessairement en passer par la consommation de ressources dont le système nous fait dépendre en épuisant le monde et nous plongeant dans l’ignorance de nos ressources propres. Nous verrons comme une nouvelle spiritualité, qui nous relie au réel, un réel perdu, peut être investie, puis comment un ressourcement psychique, permettant de trouver nos ressources propres et de nous libérer et de la misère et de la dépendance peut être possible. Dans les deux cas, cela sera à penser dès l’enfance, notamment en penser un espace éducatif élargi, laissant place à la plus grande liberté possible.

  • 9h30 : La transition de l’enseignement traditionnel à l’enseignement en ligne à l’université par le Prof. Jacques Audran (INSA Strasbourg)

Les mesures de confinement imposées aux établissements d’enseignement supérieur au premier semestre 2020 en Europe ont nécessité une migration d’urgence vers l’enseignement en ligne pour assurer la continuité des enseignements. Bien qu’un soutien ait été généralement proposé aux enseignants, il leur a fallu s’adapter d’urgence à ces nouvelles conditions de travail. Cette situation de transition particulière a offert l’opportunité de mieux comprendre la complexité du défi auquel ont dû faire face les enseignants au travers de l’analyse de leurs avis, remarques et actions.

Quand on évoque le changement climatique c’est souvent à travers des moyennes à l’échelle planétaire et des perspectives à long terme. Les menaces liées au changement climatique ont souvent du mal à être comprises à l’échelle locale et cela ne favorise pas la nécessaire prise de conscience de l’urgence d’engager des “transitions” vertueuses dans tous les domaines d’activité, à toutes les échelles, individuellement et collectivement. La lutte contre le changement climatique est l’affaire de tous, en termes d’action mais aussi parce que l’insouciance, l’ignorance, sont des facteurs d’aggravation de la vulnérabilité des territoires et de leurs acteurs. Or les travaux réalisés, notamment dans le cadre des programmes Interreg Clim’ability et Clim’ability Design (2016 – 2023) ont montré que les conséquences du changement climatique seront particulièrement fortes dans le Fossé Rhénan, notamment en ce qui concerne l’occurrence d’événements extrêmes, telles que des inondations majeures, dont les dernières datent d’il y a plus de 30 ans. Or, la catastrophe qui a frappé l’Allemagne et la Belgique en juillet 2021 est venu brutalement nous rappeler à quel point les inondations pouvaient être destructrices, notamment du fait de l’aggravation liée au changement climatique. Sommes-nous préparés face à ce type d’événement ? Quelles leçons peut-on tirer de cette catastrophe et de sa gestion, en les transposant dans le contexte transfrontalier du Fossé Rhénan ?

Autrefois inconnu, le concept d’Éducation Inclusive (EI) s’est depuis largement formé et répandu. Les organisations internationales sous l’impulsion et la coordination fondatrice de l’UNESCO adossé et soutenu par les théories de la complexité de l’« unitas multiplex » (Morin, 2006) ont joué un grand rôle dans ce processus d’émergence… au moins tout autant que les objectifs fixés à l’horizon 2030 et faisant de l’éducation « un droit humain et une force pour le développement durable et la paix » (Unesco, 2015).

Mais donner un espace n’est pas signe pour autant de consensus et les questions posées par l’EI, appréhendées tant du point de vue international, national, que local, peuvent même renvoyer les acteurs des systèmes éducatifs à des injonctions contradictoires et leurs souffrances associées (Bateson, 2008 ; Elias, 1993 ; Legrand, 2020) :  un paradoxe pour cette société qui se veut résiliente en voulant faire vivre « une éducation de qualité… pour tous …sans aucune discrimination » mais qui se voile dans un Pharmakon sans fin.

Dès lors, les préfixes “inter” et “trans” paraissent noeudal et féconds pour traduire à la fois le principe d’unité/diversité-s conceptuelle et le défi que représente cet adossement réciproque (inter&) pour le devenir incertain d’un changement attendu (trans&). En nous appuyant sur des entretiens menés avec des enseignants-chercheurs, nous discuterons ce « à travers quoi » chaque acteur « chercheur-apprenant » (Perez, 2018, 2020) est invité tout à la fois à se soumettre, trans-gresser et s’a-ffranchir de ces nouvelles normes, qu’une organisation porte et ce justement pour fairetrans-ition de « ce pour quoi » elles ont été pensées.

  • 11h15 : Atelier de synthèse
  • 12h00 : Repas commun
  • 13h00 : Entre tradition et modernité, une transition agricole porteuse d’héritages et d’expériences par la Dr. Valentine Erné-Heintz (Maître de conférences – CERDACC UR 3992Université de Haute-Alsace)

La présentation aborde la transition agricole à l’aune d’une étude de terrain auprès d’agriculteurs du Grand Est menée en 2018. Elle aborde la difficulté à définir le produire autrement, au poids de l’héritage des pratiques et des relations entre les anciens et les jeunes agriculteurs dans la capacité à faire rupture et à s’adapter au réchauffement climatique.

Le véhicule automobile a fortement contribué à façonner nos sociétés modernes. Nous devons néanmoins repenser ce moyen de locomotion de façon à limiter d’une façon générale son impact négatif sur la qualité de vie et répondre ainsi aux enjeux en matière d’écologie, de sécurité, de gestion de l’infrastructure routière et de la mobilité pour tout.es. Dans ce contexte, la récente émergence du véhicule autonome (ou sans conducteur) ouvre des perspectives très intéressantes en matière de transport intelligent. Ces véhicules à conduite autonome constituent une opportunité originale afin de remettre en question le paradigme actuel de la mobilité individuelle ou semi-individuelle sur divers aspects : économiques, sociétaux, juridiques, etc. En effet, les futurs modèles de mobilité sur lesquels ces véhicules s’appuieront diffèreront probablement de ceux actuellement existants. Pour cette raison, une démarche interdisciplinaire et interculturelle de réflexion et de travail doit être envisagée dans la perspective d’appréhender le véhicule autonome dans sa globalité et de préparer ainsi sa présence future. Articulé autour de trois questions d’où vient-on ? où est-on ? et où va-t-on ? Cet exposé apporte un aperçu de l’état actuel des recherches dans ce domaine accompagné de quelques réflexions et retours d’expériences des travaux effectués au sein de l’IRIMAS de l’UHA.

  • 14h00 : Pause
  • 14h15 : Les géographes et les Transitions Studies : informer spatialement les études des transitions en analysant le nucléaire par le Dr. Teva Meyer (Maître de conférences – CRESAT UR 3436Université de Haute-Alsace) [/su_list]

Les géographes ont dénoncé le manque de considération pour l’espace dans les modèles construits par les Transitions Studies pour comprendre les transformations des systèmes énergétiques, et particulièrement par la « Multi-Level Perspective » (MLP). La MLP considère le monde sociotechnique comme articulé en trois niveaux : le paysage qui renvoie à la « toile de fond technique, physique et matérielle qui soutient la société » (Geels, 2002), le régime qui correspond au système sociotechnique dominant et les niches, où se développent les innovations capables de perturber le régime. Selon ce modèle, une transition se produit quand le régime se transforme sous la pression conjointe du paysage et des niches (Geels et Schot, 2007). La critique spatiale de la MLP a souligné son caractère homogénéisant de l’espace, son manque de considération pour le local ainsi que son inopérabilité pour comprendre la multiplicité des chemins locaux de transition (Bridge et al., 2013).

Sans rejeter ces critiques, il apparaît nécessaire de questionner le regard porté par les géographes sur les Transitions Studies. Considérant l’importance d’étudier les « formes particulières de pensées et de sentiments politiques» (Huber, 2013) qui accompagnent les pratiques énergétiques, cette communication propose de réfléchir au moyen d’informer spatialement le cadre de la MLP en posant l’hypothèse de l’existence de représentations spatiales structurant les niches d’innovation qui concurrencent les régimes énergétiques dominants.

  • 14h45 : Atelier de synthèse et perspectives

Cet événement est gratuit sur inscription à l’adresse chaire-interculturalites@uha.fr.
Nombre de participants limité à 40 personnes. Pass sanitaire obligatoire.